Que sont-ils devenus ? Laurent Bloch, Pilote de ligne chez EasyJet
Interview de Laurent Bloch, Diplômé de l’Edhec Business School en 2012 et Officier Pilote de ligne chez EasyJet
1/ Pourquoi avoir choisi d’intégrer une école de commerce & particulièrement l’EDHEC BS ? Faisait-elle partie de vos premiers choix ?
Après un bac S, je suis rentré en classe préparatoire scientifique, la fameuse maths sup/spé. Étant passionné d’aéronautique, je voulais devenir pilote de ligne. Après 2 tentatives infructueuses au concours de l’ENAC, la question de mon avenir s’est vite posée. Pour donner un élément de contexte, tout se passe en 2007-2008 et à cette époque les compagnies aériennes traversent une crise profonde.
Ne souhaitant pas continuer dans la filière ingénieur, je me suis orienté vers les concours d’écoles de commerce. J’avais très envie de découvrir ce qui se passait derrière des termes tels que « marketing », « finance », « vie associative » etc. Mon frère était à l’ESCP. Il me parlait des cours et des nombreux débouchés. C’est donc tout naturellement que j’ai fait ce « switch » en préparant les concours des écoles de commerce. L’EDHEC était mon premier choix car excellente en finance, avec une vie associative très développée et des spécialisations qui m’attiraient. Je voulais intégrer la meilleure école possible et c’était l’EDHEC.
2/ Qu’avez-vous fait en école de commerce pour tirer le meilleur parti de cette formation ?
Outre sa filière en finance, l’EDHEC est très réputée pour la richesse de sa vie associative. J’ai intégré une association de soutien scolaire dont j’ai eu le plaisir d’être élu président en 2e année. J’ai aussi fait partie d’EDHEC Nations Unies. L’idée de se placer dans la peau d’un représentant des Nations Unies et d’aller débattre de sujets de première importance avec des gens du monde entier était extraordinaire.
Ce sont ces expériences qui m’ont le plus marqué pendant mes années d’études. C’est ce qui reflète au mieux le monde qui nous attend une fois diplômé. On y développe son réseau et de multiples compétences (communication, organisation, comptabilité, etc). Ça nous responsabilise. L’EDHEC nous laisse le champ libre pour développer nos projets et elle nous y accompagne. Que demander de mieux ?
Sur un plan plus « professionnel », j’ai fait une année de césure chez Airbus à Bristol, en Angleterre. Pour un passionné d’aéronautique, le choix était assez évident. J’étais en gestion de projet au sein du département « Flight Physics ». Pour vulgariser le terme, c’est là où sont dessinés les avions. C’était un stage compliqué car Airbus est une entreprise répartie dans plusieurs pays, avec un nombre de départements incalculable et principalement composée d’ingénieurs. Malgré un contenu de stage vague, le point marquant fut la réalisation du booklet « Flight Physics for Dummies » (c’est-à-dire : Flight Physics pour les nuls). L’idée était d’avoir un document à destination des nouveaux arrivants afin de leur présenter le département. Cela m’a pris environ 4 mois à faire car il a fallu interviewer tous les chefs de groupe et leur faire valider le contenu. C’était très intéressant de comprendre comment une telle entreprise fonctionne.
Pour l’anecdote, quand j’y étais, j’ai travaillé du bout des doigts sur les projets « Sharklet » et « NEO », respectivement ce qu’on place au bout des ailes des A320 et leur nouvelle motorisation. Aujourd’hui je pilote ces avions…plutôt fun !
3/ Qu’avez-vous fait à votre sortie de l’EDHEC BS ?
Je recherchais un emploi en marketing, n’ayant été convaincu ni par la majeure suivie en dernière année (consulting) ni par la gestion de projet.
En janvier 2012, lors du forum EDHEC (rencontre avec les entreprises), je suis passé sur le stand Coca-Cola. J’y ai déposé un CV pour le Graduate Programme Sales & Marketing. Après des nombreuses étapes de recrutement, j’intègre finalement le programme qui dure 3 ans.
La première année, j’ai été chef de secteur avec un parc de 23 hypermarchés en Champagne-Ardenne à gérer. Mon objectif était de développer le chiffre d’affaire des produits commercialisés. Pour cela, j’avais 2 leviers d’action :
– faire respecter les accords nationaux en assurant que l’ensemble de la gamme des produits commercialisés soit présente en rayon
– faire des opérations promotionnelles en mettant les produits en avant en dehors du rayon (délocalisation en entrée de magasin, rayon boucherie etc)
J’avais également une équipe de 4 personnes à gérer.
C’était une expérience extrêmement enrichissante. J’y ai développé des compétences en négociation et organisation. Par ailleurs, quand on veut comprendre un business, le « terrain » est une étape indispensable.
La deuxième année s’est déroulée dans l’équipe du Shopper Marketing. D’une certaine façon, ce que je faisais sur le terrain découlait du travail de cette équipe. Il s’agissait de négocier les opérations promotionnelles avec les acheteurs nationaux. Quand une enseigne vous dit « 2 bouteilles achetées, la 3e offerte », c’est parce qu’il y a eu une négociation sur les tarifs et volumes entre le fournisseur et le client, pour faire très simple. Enfin, la troisième année était du marketing produit pur et dur. J’ai contribué au développement de gamme de la marque Fïnley. Avec ma manager, nous avons développé 3 parfums. Cela passe par des analyses de ventes (quels parfums fonctionnent chez les concurrents), tests consommateurs (faire gouter plusieurs prototypes), comment communiquer (pub télévisée, internet etc) et le développement du packaging. Passionnant !
4/ En 2015, vous décidez de prendre un tournant dans votre vie et de vous former à la Bristol Groundschool pour être pilote de ligne … Pourquoi ?
J’ai adoré mon expérience chez Coca-Cola. C’est une belle entreprise et les gens qui j’ai rencontré là bas étaient formidables. Bien qu’investi, je n’étais pas très motivé par mon travail, peu passionné. Ce n’était professionnellement pas viable, on passe trop de temps au travail pour ne pas s’y plaire vraiment. Le seul endroit où je me suis toujours projeté est un poste de pilotage. C’était la raison pour laquelle j’avais péniblement fait 2 années de classe prépa scientifique, passé 2 fois le concours de l’ENAC et une fois celui d’Air France. La passion du pilotage est innée chez moi. Mon attrait pour les avions a toujours été très fort. J’avais, à l’époque, ma licence de pilote privé mais je souhaitais aller plus loin et vivre cette passion au quotidien
C’est donc assez naturellement que je décide en décembre 2014 de commencer des cours à distance pour obtenir les 14 modules théoriques de la licence de pilote de ligne.
5/ Comment avez-vous fait pour conjuguer votre vie de salarié et votre formation de pilote de ligne ?
L’année 2015 à été l’année du défi sur le plan professionnel. Je n’avais rien dit de ce projet de reconversion de peur d’être écarté des projets.
La journée, je travaillais chez Coca-Cola. Le soir, j’étudiais de 20h à minuit. Cela du lundi au vendredi. Mes week-ends ressemblaient à celui d’un étudiant de prépa : études toute la journée du samedi, sortie autorisée le soir. Dimanche matin jusqu’en début d’aprem, études. Relâche en fin de journée. Mes vacances ont été inexistantes pendant cette année. L’organisme par lequel je suis passé pour la licence théorique nous imposait 1 semaine de révisions intenses avant de passer les examens; tous mes congés y ont été consacrés. Ma passion a été (et demeure) un moteur extraordinaire.
6/ En quelle année êtes-vous devenu pilote de ligne ? Pouvez-vous nous décrire une journée de travail lorsque l’on est pilote de ligne ?
J’ai obtenu la licence théorique de pilote de ligne en janvier 2016. En mars 2016, je suis parti m’installer en Angleterre pour la formation pratique. J’ai obtenu en septembre l’ensemble des certificats nécessaires pour postuler en compagnie. Début octobre, j’ai été invité aux sélections pilote chez easyJet. Après la formation sur A320, j’ai fièrement intégré la compagnie le 3 janvier 2017. Le début du rêve !
SI je devais donner une définition du métier de pilote ce serait « emmener des passagers d’un point A vers un point B de façon sûre, le plus rapidement et confortablement possible, tout en assurant un maximum de rentabilité pour l’entreprise ».
Concrètement, j’arrive à l’aéroport 1h avant le départ. J’étudie avec le commandant de bord les plans de vol et les météos. Nous décidons des quantités de carburant à emporter et qui « fera l’étape », à savoir qui pilote. Ensuite, nous allons à la rencontre de l’équipage commercial. Nous leur donnons les temps de vols et spécificités notamment si des turbulences ou mauvaises météos sont attendues.
Nous arrivons à l’avion 35 minutes avant le départ. Nos tâches sont: inspections extérieures, insertion des données de vol dans l’ordinateur, calcul de masse et centrage (étape cruciale !) puis briefing. Pendant ce temps, les passagers embarquent, les bagages sont chargés et le carburant coule à flots dans les ailes.
Les 2 principales difficultés sont:
– partir à l’heure: vous n’avez pas idée du nombre de paramètres qui rentrent en compte
pour partir à l’heure: les passagers peuvent prendre du temps à s’installer, le camion qui fait le plein de carburant peut arriver en retard ou tomber en panne, le contrôle aérien peut nous retarder afin de réguler l’ensemble du trafic dans les airs etc.
– la météo, aussi bien au départ, en route qu’à l’arrivée. C’est elle qui complexifie nos journées : orages, grèle, neige, vent…on affronte tout ; néanmoins le danger est toujours limité car il n’est pas question de prendre le moindre risque (safety first!)
La responsabilité des pilotes est énorme. On nous confie un avion qui coûte environ 100M$, qui va peser au décollage en moyenne 62 tonnes dont 10 de carburant. Le tout avec 192 personnes à bord dont 6 membres d’équipage, pilotes inclus. C’est pour cette raison que tous les 6 mois nous passons au simulateur. On y traite uniquement des pannes et notre licence est en jeu. Pas simple.
Même si le métier présente quelques inconvénients, notamment sur les horaires, j’ai le plus beau bureau du monde. Je vois le soleil tous les jours, les paysages sont magnifiques et les sensations procurées par le vol inégalables.
Objectif atteint : depuis que je suis pilote, j’ai arrêté de travailler.
7/ L’école de commerce a-t-elle été un plus pour devenir pilote ?
Clairement !
Quand on est pilote, on doit savoir bien communiquer (que ce soit avec l’équipage, les passagers ou d’autres intervenants), s’organiser, et prendre des initiatives. Ce sont des choses qu’on apprend en école de commerce, notamment dans les expériences associatives. Cela s’est ressenti au poste de pilotage. De nombreux commandants de bord trouvaient dès mes débuts que j’anticipais bien les choses et que je venais avec des solutions aux problèmes. Tout comme on fait en école !
8/ Avez-vous un conseil à donner aux étudiants PGE-PGO qui s’apprêtent à passer les concours et qui ont des idées de parcours assez atypique comme le vôtre ?
Allez au bout des choses !
Etre diplômé d’une école, c’est un gage de sérieux. On y développe de nombreuses compétences et on y affine nos projets, quels qu’ils soient. Cela permet de murir les idées qu’on a en tête et d’acquérir de l’expérience.
Un parcours atypique n’est pas un problème : il faut tout simplement savoir l’expliquer et savoir où on va.
9/ D’ailleurs… pouvez-vous nous rappeler en quelle année vous avez suivi la préparation aux concours des écoles de commerce PGE PGO ?
J’étais chez PGE-PGO en 2008. J’y ai fait les préparations aux écris et aux oraux. J’en garde un souvenir mémorable.
Au moment de pivoter vers les concours des écoles de commerce, PGE-PGO était une toute petite structure. Néanmoins j’ai été très rassuré par le discours de son créateur, MBK, qui semblait sûr de lui et qui voulait que son entreprise fonctionne. Ça a marché. Pour lui comme pour moi !
10 / Pourquoi avoir choisi de suivre une préparation ? Quelle formation suiviez-vous à l’époque ?
Les concours maths sup/spé n’ont rien à voir avec ceux des écoles de commerce. Je voulais mettre toutes les chances de mon côté pour réussir. Il n’était pas question de bricoler, il fallait que je me prépare sérieusement. PGE-PGO proposait une préparation adaptée qui a permis d’appréhender sereinement l’ensemble des matières.
11/ Quel souvenir gardez-vous de PGE PGO ?
C’était les débuts pour les fondateurs et ce n’était pas simple pour eux. Pendant la préparation aux écrits, certains professeurs ne sont pas venus, sans même prévenir. Des remplaçants ont été trouvés au pied levé. C’était impressionnant. J’ai aperçu de loin ce que pouvait être la vie d’entrepreneur : stressant mais Ô combien gratifiant quand cela fonctionne.
Le stage de préparation aux oraux était tout aussi bien que les écrits. Les directeurs étaient très présents et investis, ils voulaient que nous réussissions. Ils se sont surpassés. Eux aussi étaient passionnés.
Suite à cela, j’ai eu le plaisir de revenir chez PGE-PGO en tant que professeur et membre de jury. J’en garde un excellent souvenir.
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